(c) Delphie
EMILIE JEAN & DUMARTEAU

V

ingt trois janvier mille neuf cent quatre vingt neuf :

Caus’ I was born this way

Aujourd’hui, je suis né. Ma mère est française, mon père américain. Il aime ma mère, ou plutôt il l’a aimé. Jusqu’à ce que le fruit de ces galipettes se retrouve enfermé dans les entrailles de ma mère. C’est là qu’il a déposé un chèque, sa bague et un baiser à ma mère puis est sorti pendant qu’elle dormait encore. Il a pris son bagage, a laissé les clés près de l’entrée puis ma mère ne l’a plus revu. Mais ça, d’après ma mère, ça c’est passé bien avant le jour J, le jour si important pour elle. En effet, près de neuf mois plus tard, je sortais de son ventre rond, pour voir le soleil pour la première fois, pour sentir la mer de Nice et pour vivre son rêve, devenir danseuse. Ma mère avait toujours voulu monter sur les planches, être acclamée par le public, puis elle a rencontré mon père, et elle a tout quitté pour lui. Elle se retrouvait maintenant seule, avec un bébé, et des rêves brisés pleins la tête. C’est fou ce que la vie pouvait être horrible ; mais j’étais là pour lui rendre justice, pour prendre une revanche sur le destin. Ce serait moi, la reine du ballet.

V

ingt trois janvier deux mille quatre:

We’re gonna dance, until we die …

Quinze ans, enfin. C’est une grande date. Après une enfance assez folle avec ma mère, je viens enfin, je l’espère, d’atteindre l’âge de raison. J’ai commencé la danse à 3 ans, comme la plupart des petites filles. Ma mère m’avait inscrit à une petite école de ballet au coin de notre rue. Sa petite Jean devait tout apprendre. Heureusement pour moi, et pour elle aussi, je m’averrais douée, mais pas vraiment pour le ballet. Je continuais néanmoins de souffrir chaque semaine, réprimandée par ma professeur « Lève les bras, tiens toi droite, bombe ta poitrine, rentre tes fesses ; et patati, et patata … ». A force, cela devenait vraiment insupportable. De l’autre côté du parquet, je tenais en même temps mes cours ; où les mathématiques et la grammaire me menaient le même combat. Mes seules joies étaient d’allumer une radiocassette, de me défouler au son de cette musique entêtante, de me laisser tomber dans le canapé et de lire un livre d’aventure ou à l’eau de rose. J’adore lire, et écrire aussi, j’aime danser, chanter, me défouler. Je suis un peu comme tout le monde, mais en pire. J’étais pris dans un tourbillon d’émotions, l’amour. En effet, j’étais un peu du genre à rêver au prince charmant moderne, avec de la lumière partout, des cœurs roses qui flottaient dans l’air ; je voulais de l’action à la Woody Allen. Je n’en pouvais plus de toute cette routine, alors j’ai décidé de laisser tomber la danse classique et de me concentrer un peu plus sur les danses modernes et plus « faciles » à pratiquer je dirais. C’est là que j’ai commencé à danser le Jazz et la Salsa.

V

ingt trois janvier deux mille sept:

Gonna let the light, shine on me

Paris, Ô Paris. Dix huit ans. Il était temps que je devienne majeure. Je viens de prendre un grand tournant dans ma vie. Il y a trois, j’ai lâché l’école après mon brevet. Marre des maths. Je suis partie en Angleterre, pays de la comédie musicale. Je suis entrée à l’école dans une école de danse ; très prestigieuse. Il faut bien être entreprenant dans sa vie. J’ai passé là-bas des années folles et magnifiques. Trois ans d’étude, plusieurs amours, d’une nuit certes, mais j’étais amoureuse, enfermée dans ma chambre, en câlinant mon oreiller. Un jour, je suis même aller jusqu’à embrasser un garçon parce que je le trouvais mignon ; le petit problème, c’est qu’il était avec sa petite copine et que je l’ai fait retourné en lui tirant les cheveux. Fougueuse et impulsive. Un peu jalouse aussi, mais surtout rêveuse. Je me laisse toujours aller dans les bras du danseur qui me fait face. Par contre, je suis aussi très sarcastique, surtout quand je suis jalouse. C’est aussi à Londres que j’ai vu ma première comédie musicale. Puis aussi les dizaines qui vinrent par la suite. J’étais fascinée par toutes ces filles et ses garçons qui dansaient dans tous les sens, mais en si belle harmonie. Je connaissais toutes les comédies par cœur, toutes les chorégraphies, je les connaissaient jusqu’au bout des doigts. Mais maintenant que j’avais fini de danser, il fallait revenir au pays. J’espère bien que je trouverais un job sympa là-bas, mais je suis assez confiante. D’ailleurs, ma mère m’avait dit qu’elle me réservait une surprise là-bas…

V

ingt trois janvier deux mille onze :

Love & other drugs

Dans le bistrot, comme d’habitude. J’étais, comme d’habitude, en train de prendre un petit verre avec un petit bonhomme que je ne connaissais pas. J’avais envie d’amour, alors si lui ne venait pas à moi, j’allais à la rescousse de Cupidon pour trouver le bonheur. Merci meetic.fr. Je suis une grande fana de rencontres sur le net depuis que je suis ici, à la capitale. Sinon, je me retrouve souvent au lit avec Thomas. Je suis toujours aussi folle de danse, et j’ai réussi à décrocher un rôle dans une nouvelle pièce de théâtre. J’aime beaucoup la troupe, et je suis assez talentueuse sans vouloir me vanter. Après avoir dansé avec les plus grands, j’essaie de m’adapter et d’apprendre la chorégraphie comme je le peux. Sinon, tout se passe aussi bien dans ma vie, excepté les remous de ces histoires de rencontres en ligne, mais j’aime ça, alors … Voilà un peu ma vie, même si celle là n’est pas aussi folle qu’on la croyait, quoique, j’en ai fait des choses folles…

Spoiler: